Le Juge Des Enfants

Nous nous sommes rendu à Bordeaux le samedi 15 décembre aprés midi pour rencontrer une jeune juge des enfants agée de 31 ans qui se prénome Sophie (dont on ne dira pas le nom de famille car elle préfère garder l'anonymat).

Dès le collège, Sophie pensait travailler dans le milieu de la Justice. Elle se voyait plutôt avocate. « Durant mes études de droit, j’ai appris à connaître les différents métiers de la Justice et c’est la magistrature qui m’a intéressée. »  Sophie se rend compte qu’elle préfère instruire un dossier plutôt que défendre un client. À 27 ans, elle endosse la robe de juge des enfants. « Mon métier consiste, d’une part, à protéger les enfants en danger, et, d’autre part, à juger les mineurs délinquants. » Sophie partage son quotidien entre son cabinet (bureau) où elle reçoit les parents et les enfants, et les audiences au tribunal, au cours desquelles elle juge des mineurs délinquants. Elle avoue que son métier n’est pas facile tous les jours : elle est confrontée à des situations difficiles. « Si l’on veille au bien-être de l’enfant et si l’on est honnête et respectueux avec les gens, tout se passe bien. »

Je suis en première ES. J'aimerais être juge pour enfants mais j'hésite encore entre faire un DUT carrière juridique et ensuite intégrer une fac de droit ou aller directement en fac de droit après le bac.
Si on est émotive peut-on espérer tenir bon dans ce métier qui demande beaucoup ?

Pour répondre à ta question, il me semble plus simple d’intégrer directement une faculté de droit après ton bac même si le niveau est plus difficile sur les deux premières années. J’ai eu l’occasion de rencontrer des étudiants en DUT, et ceux-ci me faisaient part de la difficulté à intégrer la fac après cette formation (l’enseignement dispensé n’est pas exactement le même, et en première année à la fac, on se forme à certains apprentissages tels que les commentaires des décisions de justice et qui se révèlent fort utiles pour la suite du cursus). Pour ce qui est du niveau, il n’est pas nécessaire d’exceller mais plutôt d’être constante dans les apprentissages et d’être très rigoureuse.
La sensibilité est une qualité intéressante dans ce métier à condition bien sûr qu’elle n’empêche pas de rester clairvoyant. Il ne faut évidemment pas se laisser submerger par ses émotions. Mais c’est quelque chose qui s’apprend et qui se contrôle.

Est-ce que c'est dur comme métier ?

Eh bien ta question est difficile. Oui mais j’imagine comme de nombreux métiers. Les responsabilités sont importantes, on est isolé dans la prise de décision et confronté à des cas difficiles. Ce qui diffère avec les autres fonctions des magistrats, c’est sans doute cette composante affective qui fait que parfois on se sent plus exposé émotionnellement.

J'aimerais savoir si l'entrée à l'école nationale de magistrature est réellement difficile ? Et en quoi elle consiste ? Et plus généralement, si les études ont été difficiles pour vous.

Effectivement c’est un concours difficile auquel se présentent de plus en plus d’étudiants. La concurrence est donc rude mais pour relativiser mes propos, tout le monde n’aborde pas ce concours avec le même sérieux et la même préparation. Il ne faut donc pas se laisser impressionner par le nombre de candidats. Il y a d’abord les épreuves écrites d’admissibilité d’une durée de cinq heures chacune (droit civil, droit pénal/ou droit administratif, note de synthèse et culture générale) puis les épreuves orales d’admission (oraux de procédure, sport, langues vivantes et grand oral de culture générale). C’est seulement à la fin de ce marathon qu’on décroche le sésame.
Pour répondre à ta question sur les études, je dirais que le droit en général et le raisonnement juridique en particulier nécessitent une approche abstraite que certains étudiants parviennent aisément à acquérir tandis que d’autres échouent. Cela ne consiste pas en la récitation des textes des codes mais plutôt à une compréhension de l’esprit des textes et une bonne interprétation. Je n’ai donc pas trouvé cela particulièrement difficile mais il est vrai que certaines matières me rebutaient plus que d’autres.

Je voudrais savoir quelles sont les qualités nécessaires pour devenir juge pour enfants ? Les horaires sont-elles chargées, est-ce que ce métier peut "déstabiliser" un peu la vie privée ? Question indiscréte : quel est votre salaire approximatif par mois ?

Il me semble que les qualités qui font d’un magistrat un bon juge des enfants sont d’abord, la compétence juridique et ensuite un certain intérêt pour les questions qui touchent au domaine de l’enfance, de la psychologie et des rapports humains. Le droit doit répondre à des situations de souffrance pour les individus et demande forcément une appréhension globale qui se rapproche des sciences humaines.   
Les horaires sont lourds (plus de 50 heures par semaine) et variables, dépendant de l’activité du tribunal. Parfois il m’arrive de terminer à 22h voire plus tard mais cela reste exceptionnel. Ce qui est sûr c’est qu’il faut bien s’organiser dans sa vie familiale pour pouvoir être disponible au niveau professionnel.
Il est évident que certaines situations marquent plus que d’autres émotionnellement. On n’est (heureusement) jamais insensible à la détresse des familles. Mais il faut aussi savoir prendre du recul et que cela n’empiète pas sur la vie privée. C’est une question d’équilibre et je pense qu’on peut très bien y arriver lorsqu’on a la chance d’avoir une vie sociale et affective bien structurée. 
Pour ce qui est de ma rémunération, elle n’est pas fixe et reste évolutive. Lorsque j’ai débuté, j’avais un salaire équivalent à 2500 euros et aujourd’hui après cinq années d’exercice, je perçois à peu près 3200 euros (mais cela comprend des primes diverses).

Je voudrais savoir si ce métier est difficile, si vous êtes stressée à l'idée de faire des erreurs concernant les enfants ?

Oui ce métier est difficile comme beaucoup d’autres d’ailleurs. Les responsabilités sont importantes, on est isolé dans la prise de décision et confronté à des cas difficiles. Ce qui diffère avec les autres fonctions des magistrats, c’est sans doute cette composante affective qui fait que parfois on se sent plus exposé émotionnellement.
Personne n’est à l’abri d’une erreur et je me pose constamment la question. Je dirais simplement qu’il est des situations où les choix sont plus évidents que dans d’autres. Mais ce n’est qu’a postériori qu’on sait si nos choix ont été les bons.

...pour signaler un cas ou être écouté (jeunes et parents) :

Allô Enfance maltraitée : 119 (24h/24)

...Pour être renseigné et écouté :

Fil santé jeunes, numéro vert : 0 800 235 236 (de 8h à 24h)

Enfance et partage, numéro vert : 0 800 05 12 34 (du lundi au samedi de 9h à 21h)

SOS Croix rouge écoute, numéro vert : 0 800 858 858 (du lundi au vendredi de 10h à 22h)

SOS Familles en péril, tél. : 01 42 46 66 77

Inter service parents, tél. : 01 44 93 44 93

Centre de Recherche et d'Innovation dans le Champ Social (CRICS), tél. : 01 43 35 08 47

Nous avons pris contact avec une jeune fille de 17 ans dont on ne sitera pas le nom pour protéger son identité. Elle nous a confié son désarroi, et on vous le fait partager:

Quelle est votre situation familiale au jour d'aujourd'hui?

C'est parents d'un côté et fille de l'autre. J'avais plus d'affinités avec mon père mais par amour il soutenait ma mère. Et ma soeur étant la préférée de mes parents ne se souciait pas de me défendre.

Quels sont vos rapports avec votre mère en ce moment?

Aucun dialogue n'existe. Ni "bonjour", ni "au revoir", ni "bonne nuit". Ma mère m'a affirmé que j'étais chez moi, "chez elle" que pour manger et dormir. Elle m'a même dit qu'elle ne s'occuperait plus de moi. Cependant mon père m'a avoué qu'il prendrait soin de moi. (touchée)

Est-ce-que cela a toujours était le cas?

Non, avant c'était une relation mère-fille normale, bisous, calins, journées shopping, rigolades. Mais j'ai toujours senti une réticence.

Si non, quel a été l'élément déclencheur?

Ca a été le jour ou j'ai anoncé à mes parents que je voyais un garçon plus âgé. C'est-à-dire? 23 ans pour lui et 17 pour moi.

Est-ce-que vous cherchez l'un ou l'autre a ce que la situation s'améliore?

Dans l'immédiat non, tout le monde reste sur ses positions.

Quelles sont les formes de violences avec votre mère? Sont-elles verbales, physiques ou autres? Justifiez les propos.

Le plus c'est verbal, des choses qui font mal. Un jour elle m'a dit "t'es plus ma fille, t'existes plus, tu seras à jamais qu'une p***". Elle m'a même avoué que j'étais une naissance non désirée, que j'étais qu'un banal accident. (en pleurs)

Qu'est ce qu'en pense votre entourage? (famille, amis, etc...)

Je n'en parle pas à ma famille pour ne pas faire d'histoires et pour ne pas me la mettre à dos. Mes amis me soutiennent, ne comprennent pas les réactions de mes parents mais surtout de ma mère... Mes amis prennent ma mère pour une "folle"... et ils n'ont peut être pas tord.

Avez-vous déja eu recours à un juge des enfants?

Non!!! L'avez-vous pensé? Oui, je l'ai pensé. Mais prendre contact avec un juge des enfants est très long et détruit la famille et l'environnement. Lorsque je lui ai dit que je pensais me renseigner elle m'a répondu "passe moi le papier, je le signe de suite".

Quelles sont donc vos intentions futures?

Je resterai avec mon copain jusqu'à ce que mes parents acceptent mon choix. Et j'essairai de comprendre ma mère même si cela n'est pas facile. Mais si elle continue à me blesser comme elle le fait, elle va finir par me perdre et signera le papier pour de bon.

De nos jours une petite amélioration se crée dans le comportement de son père et de sa soeur. Sa soeur cadette commence à prendre sa défense. Mais la mère perssiste dans son raisonnement. A la fin de l'interview, la jeune lycéenne nous a confié qu'elle avait même pensé à fuguer.

Le juge des enfants intervient dans le cas de mineurs en danger, lorsque la santé, la sécurité, ou la moralité d'un enfant sont menacées ou quand les conditions de son éducation semblent compromises. Les 18/21 ans sont confrontés à des difficultés d'insertion et demandent la poursuite d'une mesure d'assistance éducative au-delà de leur majorité.

Il peut être saisi pas les parents, la personne ou le service à qui l'enfant a été confié, le tuteur, le mineur lui même ou le ministère publique dans le cadre de l'assistance éducative.

Où s'adresser? Si vous êtes préocupé par la difficulté que rencontre votre enfant, vous pouvez écrire au juge des enfants, ou adressez-vous au tribunal de Grande Instance dont dépend votre domicile.

Formation: Aprés le bac Scientifique, Littéraire ou Economique et social, il faut passer une maitrise de droit et le concours à l'Ecole Nationale de Magistrature de Bordeaux. Le juge des enfants est saisi par le parquet.

L'E.N.M. a été créée en 1958 sous l'appellation de centre national d'études judiciaires. La dénomination actuelle a été adoptée en 1970. L'École a pour mission d'assurer la formation professionnelle des "auditeurs de justice" (c'est le nom des élèves) et d'organiser la formation continue des magistrats français.

Elle contribue en outre à la formation initiale et continue des magistrats étrangers. L'E.N.M. a son siège à Bordeaux où se déroule principalement son activité de recrutement et de formation des futurs magistrats.

Elle dispose également d'une antenne parisienne où sont notamment implantés la direction de la formation continue et les relations internationales.

Le juge des enfants a été crée le 2 Février 1945. Il est spécialisé dans les problèmes de l'enfance et de l'adolescence. C'est un magistrat qui siège au tribunal de grande instance. En matière civil le juge des enfants est compétant dans le domaine de l'assistance éducative.   

Le juge des enfants est spécialiste des problèmes de l'enfant au civil comme au pénal. Cette fonction apparaît comme la moins contraignante de la magistrature. Elle comporte une grande part d'assistance éducative puisque le juge doit prendre les mesures nécessaires pour protéger et éduquer les enfants jusqu'a l'âge de 18 ans, il a deux rôles vis à vis du mineur la protection et la répression. Il peut aussi accorder une protection aux jeunes majeurs âgés de 18 à 21 ans. Par ailleurs, lorsqu'un mineur a commis une infraction, le juge des enfants peut le mettre en examen, instruire et juger l'affaire. Ce métier est donc tourné vers la prévention et l'arbitrage; et très souvent exercé par des femmes. Il oriente la procédure vers une audience en chambre du conseil ou vers le tribunal pour enfant, afin que l'affaire soit jugée. Dans cette profession il faut être doté d'un grand sens psychologique pour décider de la mesure la plus adaptée à la situation de chaque enfant. Le juge peut choisir le maintien dans le milieu familial ou le placement dans un établissement spécialisé ou une famille d'accueil.

Le juge des enfants travaille en étroite collaboration avec les services sociaux et éducatifs. Il examine les faits et apprécie si les investigations supplémentaires sont nécessaires, ces investigations sont approfondies sur la personnalité et l'environnement familial et social de l'enfant. Le juge peut éventuellement demander des examens médicaux ou psychologiques. Il peut prononcer aussi des mesures éducatives, comme le suivi de la famille par un éducateur.

Ce blog est réalisé par deux lycéennes de classe de première ES dans le cadre des Travaux Personnels Encadrés. Les informations qui s'y trouvent sont fiables. Nous vous remercions de votre attention.